Dos au mur
Ce n'est presque rien et pourtant ça ressemble à un début. Elle aimerait fumer pour expulser ces inutiles pensées. Plus de clopes, pas d'échappatoire. Dos au mur, elle s'y cramponne, s'égratigne les mains pour ne pas avoir à sauter. Ne surtout pas le franchir ce mur, y rester agrippée, coûte que coûte. Derrière lui, elle ne trouvera rien. Rien qu'elle ne connaisse déjà. Elle sait parfaitement qu'elle n'a rien à en attendre. Cette place est inconfortable, elle a mal aux bras. Elle pourrait tout lâcher pour être soulagée un moment. Elle pourrait. Le monde existe ailleurs pourtant, il fourmille et grouille de nouvelles têtes, de nouveaux fous à rencontrer. Elle voudrait courir les rejoindre, mais ce début la travaille. Elle ne sait trop comment s'en extirper. Pousser la curiosité jusqu'au vice, en avoir le cœur net mais piétiné encore? Ou passer son chemin et fermer une bonne fois pour toute la cage aux sentiments? Ce n'est pas de la peur, pourtant, c'est du réalisme. Et ceci est bien pire. Lui? Qu'en sait-il de tout cela, gonflé d'orgueil et d'indifférence, jouant avec les nuits, défiant sa propre conscience? Il s'y brûlera un jour. Mais pas avec elle. C'est cela qui la chagrine. Ne pas le faire souffrir. Ne rien évoquer en lui. N'être qu'un souffle d'air qui passe et s'oublie aussitôt. Elle aussi est orgueilleuse. Elle ne cédera pas la première, ça non! Qu'il reste donc de son côté du mur, elle ne lâchera pas, même si elle doit s'y briser les doigts. Ce début n'est qu'un leurre.